Kawasaki a immatriculé 8067 motocycles en France au premier semestre 2025 (-12,8% Vs 2024). Pour Moto-Net.Com, le responsable marketing de la marque japonaise analyse le marché moto, le phénomène Euro5+, l'accueil des nouveautés 2025, l'impact du contrôle technique, etc. Interview MNC de Benjamin Kapkowski.
Moto-Net.Com : Le marché moto est en baisse au premier semestre 2025, mais vous vous y attendiez sans doute, en raison des effets secondaires du "dopage aux produits Euro5" observée fin 2024 ?
Benjamin Kapkowski, responsable marketing de Kawasaki France : On s'y attendait, forcément, avec l'effet mécanique sur décembre 2024 de nombreuses immatriculations de modèles Euro5. Nous savions que cela impacterait les mois de janvier et février 2025, nous pensions que cela freinerait un peu le mois de mars. Le fait que le marché reste baissier au deuxième trimestre est plus une surprise.
MNC : Quel est le bilan de Kawasaki sur ces six premiers mois ?
B. K. : Kawasaki se bat, nous avons mis en place des offres et des campagnes de communication pour faire connaître nos produits. Et cela paye puisque notre marque baisse moins fort à fin juin que le marché dans son ensemble. Nous progressons donc en parts de marché. On se place troisième sur le marché (des motos, hors maxiscooters), à la lutte avec BMW et Yamaha.
MNC : Cette belle "rézistance" est notamment due à la sortie de la nouvelle Z900 ?
B. K. : Plus que de la résistance, c'est justement beaucoup de conquête ! Elle nous aide (la "Zed", NDLR !) beaucoup et reste notre meilleure vente avec près de 1800 immatriculations à fin juin. Ce sont de très, très bons chiffres pour cette machine qui a été bien lancée et qui était très attendue : les premiers modèles importés étaient tous déjà vendus.
MNC : La mention "A2" de la Z900 attire aussi, toujours ?
B. K. : Oui bien sûr. Les ventes de la version A2 ont été particulièrement bonnes en mai car les personnes qui s'inscrivent au permis moto lorsqu'il ne fait pas beau, à cause des bouchons dont ils voudraient s'extraire notamment, souhaitent profiter de leur nouvelle moto avec l'arrivée des beaux jours.
MNC : Ce succès de la Z900 limitée à 95ch donc bridable à 35kW, ne pénalise pas trop la Z650 ?
B. K. : Non car elles n'attirent pas la même clientèle. Beaucoup de facteurs font qu'il n'y a pas tant de cannibalisation que cela : la Z900 est une moto plus grosse, plus haute, et la Z650 est plus accessible en termes de prix d'achat, de consommables, d'assurance, etc. Le motard débutant qui dispose du budget pour une "six-cinquante" ne va certainement pas hésiter avec la "neuf-cents"... en rêver une fois la période A2 finie, en revanche...
MNC : C'est le même phénomène entre la Z650 et la Z500 ?
B. K. : Effectivement, il y a encore une marche ici, car la Z500 est encore plus légère, encore plus facile : tout le monde pose les deux pieds bien à plat sur la "cinq-cents", ce qui n'est pas forcément le cas sur la Z650. Après, la "six-cinquante" peut être conservée passé la période A2 car on peut la débrider et récupérer de la puissance. On profite ainsi quelque part d'une deuxième moto, ce qui n'est pas le cas sur la Z500 qui est volontairement limitée à 45 chevaux et répond à une autre philosophie car dans ce cas, le moteur est plein. Les deux propositions sont donc valables, mais ne visent pas les mêmes motards.
MNC : Question nouveautés, les Ninja 1100 SX et Versys 1100 étaient attendues des gros rouleurs et clients français ?
B. K. : Oui, surtout la Versys car elle a gagné en chevaux et en caractère moteur, elle a reçu notre toute dernière électronique et notamment le nouveau shifter. Tout cela est extrêmement bien accueilli par le public, tous se disent que ces petits chevaux supplémentaires, c'était ce qu'il manquait à cette moto. L'accueil est un poil plus mitigé pour la Ninja 1100 malgré une belle évolution, et nous gardons les fans de ce modèle. Les propriétaires de Ninja 1000 SX renouvellent leur moto par ce type de changements, et sachant que par ailleurs, il n'y a pas énormément de concurrence, pas aussi bonne tout du moins.
MNC : Comment se présente le second semestre pour Kawasaki en France ?
B. K. : Nous continuons nos opérations commerciales jusqu'à fin août. De très belles opérations puisque nous proposons jusqu'à 3000 euros d'avantages clients sur notre gamme 2024 et antérieure, sur nos cross également, et sur certains modèles 2025. Nous allons nous battre pour conserver une belle part de marché. À partir de septembre et jusqu'au salon Eicma, nous dévoilerons les nouveautés pour 2026…
MNC : Alors, quelles nouveautés 2026 chez Kawasaki, justement ?
B. K. : (Rires) C'est une bonne question, mais il va falloir attendre septembre, rester connecté comme vous dites !
MNC : Le renouvellement quasi-complet des motos en raison de la nouvelle norme Euro5+ se répercute sur le trafic en concessions, même si les visiteurs n'achètent pas forcément ?
B. K. : Ce qui est bien dans la moto, c'est qu'il y a continuellement des nouveautés. C'est agréable car chaque année, les constructeurs arrivent avec leur petit lot de nouveautés : des nouveaux modèles, des évolutions, etc. Est-ce que ce millésime a drainé plus de gens ? Vraisemblablement pas puisque le marché est baissier. Cependant, les modèles Euro5 immatriculés sur stock et vendus en "occasion zéro kilomètre" représentent de belles opportunités pour les clients finaux. Des modèles Euro5+ ont toutefois attiré beaucoup de monde, comme la Z900 chez nous car la 2025 n'a rien à voir avec la 2024, tout en se plaçant à un super tarif, inférieur au modèle qu'elle remplace, juste en-dessous des 10 000 euros. Là ce n'est plus une question de budget, mais d'esthétisme et de technologies embarquées.
MNC : Le bon point, c'est que vos clients, qui sont des motards mais aussi des citoyens aux multiples tracas quotidiens sur fond de tensions à l'international, s'intéressent toujours à la moto même si ils ne renouvellent pas ou moins leur monture ?
B. K. : On constate une profonde passion pour la moto, mais surtout une reconnaissance de l'utilité de la moto au quotidien. On croise encore pas mal de deux-roues motorisés dans les grandes villes. C'est encourageant !
MNC : Est-ce que le contrôle technique a généré un surcroît d'activité dans les ateliers ?
B. K. : Oui, on observe une hausse des rendez-vous en atelier, sur des machines que l'on n'avait plus vues depuis de nombreuses années. Des machines du début des années 2000, dont les propriétaires s'étaient eux-mêmes chargé d'effectuer des vidanges d'huile, mais ne vérifiaient pas le jeu au soupapes, ni l'état de leurs suspensions ou de leurs disques de freins, etc.
MNC : Est-ce que le contrôle technique a abouti à de nombreuses interventions ?
B. K. : Sur certaines vieilles machines oui, car leurs propriétaires se contentaient du strict minimum en termes d'entretien. Le contrôle visuel par des personnes qui ne sont pas des experts moto, mais s'y connaissent malgré tout en mécanique, ont permis de déceler des soucis. Il y a eu des retours en concessions en raison de la pollution par exemple. Or cela a du bon : certains de nos clients ont redécouvert le plaisir de conduire une moto bien réglée ! Une moto bien chaussée aussi, en changeant leurs vieux pneus contre des modèles neufs et plus récents.
MNC : Le motard est aujourd'hui moins bricoleur, est-ce faute d'intérêt, de connaissance, de temps ?
B. K. : Un peu de tout cela, sans oublier la sophistication supérieure des motos modernes, bardées d'électronique. Il faut reconnaître qu'il est devenu difficile d'installer un simple kit de clignotants sur un faisceau d'origine. Cela n'incite pas à bricoler sa machine soi-même.
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