Septembre 1999Après un dernier café sur la place du marché de Saintes, direction Bordeaux par les D145, D146 et D255, qui longent l'estuaire de la Gironde via Mortagne, St Ciers et Blaye...
L E S R O U T E S |
EN BREF |
Paroles de balade :
"A Biarritz y a rien pour la bécane, faut aller à Bayonne" Lectures de balade : E.M. |
UN ETE 99 SUR LA ROUTE (2)
Les cols des Pyrénées
De retour d'un break de 3 semaines après 4 600 km de bitume au guidon d'une 900 Trophy lestée de ma passagère préférée, les meilleurs plans de Moto-Net. 2ème partie.
Bordeaux par l'estuaire
Après un dernier café sur la place du marché de Saintes, direction Bordeaux par les D145, D146 et D255, qui longent l'estuaire de la Gironde via Mortagne, St Ciers et Blaye. Le ciel orageux, succédant à la mini tornade qui s'est abattue cette nuit sur la région, donne aux paysages de marais et de vignes une atmosphère à la fois pesante et calme. Mais la route ne présente pas un intérêt débordant dans l'ensemble, et c'est sans sourciller que nous contournons Bordeaux par sa ceinture autoroutière. Là, une petite erreur de navigation (à moins qu'elle ne soit imputable à la carte Michelin n°989 ?) nous fait prendre la D106 au lieu de la N250. D'où crochet obligatoire par la D5 qui, comme à peu près toutes les routes du coin, représente à elle seule un véritable cauchemar pour les motards, tout autant qu'une puissante incitation à l'inauguration du délit de TGV de la loi Gayssot : des kils et des kils de lignes droites interminables, bordées d'Harpic WC "Senteur des pins" grandeur nature... Le revêtement n'est même pas nickel, et les carrefours avec des chemins forestiers innombrables : pour l'inauguration du TGV, c'est raté !
Biarritz via Harpic WC Land
La D216 jusqu'à Sanguinet est tirée du même tonneau que ses consoeurs girondo-landaises, tout comme les D46, D626, D652 et D79 via Mimizan, Lit-et-Mixe, Léon, Hossegor, Capbreton, Bayonne, Anglet et Biarritz. Rien à signaler, si ce n'est le phare de Contis-Plage (très jolie spirale noire et blanche), dont le gardien n'était autre que l'arrière grand-père d'Emmanuelle. Certes, l'info n'est pas terriblement excitante - malgré l'aspect magique de cette profession disparue -, mais je vous assure qu'il ne se passe absolument rien d'autre sur les routes des forêts landaises. Ah, si : parfois, au bout de 50 bornes, il y a un virage. Et mieux vaut ne pas le gaspiller, car le suivant risque de se faire désirer un bon moment... Seule une toute petite portion aux alentours de Vieux-Boucau serpente gentiment dans les pins et leurs tapis de fougères, offrant même de courtes mais saisissantes fenêtres sur l'océan et les dunes. L'arrivée à Biarritz est plutôt agréable malgré ses Aoûtiens en goguette et ses surfeurs du dimanche, et la ville aux deux casinos - un municipal, très select, et un privé, bourré de petites mamies assoiffées de thé anglais et de bandits manchots - nous servira de camp de base pour une petite exploration des routes basques.
Le mystère des "Ventas"
Un premier conseil si vous partez sillonner le Pays basque : gaffe à l'état des routes ! En dehors de quelques grands axes, comme la N104 en direction de St Jean de Luz et Hendaye, le réseau secondaire est en piteux état. La D912 notamment, qui surplombe la Corniche basque, aurait bien besoin d'un sérieux lifting. Idem pour la D404 vers le Col d'Ibardin, et les D406 et D4 autour du massif de la Rhune (prononcez "rugne") qui, à de courtes portions fraîchement revues près (mais alors gare aux gravillons !), sont dans un état très moyen. Bizarre. Mais le plus grand mystère de la région, la cristallisation stupéfiante des petites bizarreries du genre humain - que dis-je : l'incommensurable aberration comportementale de ce grand singe savant qui envoie des fusées dans l'espace - est sans nul doute celui des "Ventas". Prenez par exemple la direction du joli - mais loin d'être exceptionnel - Col d'Ibardin, en plein mois d'août. Vous serez d'abord surpris par l'ampleur des bouchons dans le petit bled d'Herboure (200 âmes à tout casser ?). Puis l'étonnement ira croissant lorsque, lancé à l'assaut de la D404, vous devrez vous faufiler entre deux files de voitures (une qui monte, une qui descend), pare-chocs contre pare-chocs, figées dans la plus parfaite immobilité sous un soleil de plomb... Arrivé en haut, vous comprendrez alors avec effroi la seule et unique raison de ce chemin de croix pour caisseux pénitents : le pastis est moins cher... C'est donc dans sa BX bourrée de 51, cigarettes, turron et autres boules-de-neige-avec-la-Vierge-dedans que l'automobiliste féru d'économies (quoi, les 20,6% de la TVA, et encore ?), après avoir passé une bonne demi-journée à gravir les 4 km du col, 2 heures pour trouver une place sur le parking saturé d'autocars et autant pour faire demi-tour, consacrera ce qui reste de sa journée à... redescendre. Et attention, pas n'importe où, la descente : par le même chemin que la montée, pile poil, non mais des fois ! Alors que bien sûr, la descente du côté espagnol vers Vera de Bidasoa, par le très chaotique C131, est absolument déserte... A Vera de Bidasoa, débusquez sans peine le petit café restau à la sortie du bled, en direction de Sare, et demandez les platos combinados qui ne figurent pas au menu. D'un coup sec, l'Espagne réapparaîtra, belle et tranquille, sous forme de huevos fritos, patatas fritas, chorizo caliente, una cañita y un cafe con leche por favor, le tout sur une très agréable petite terrasse ombragée au fil de l'eau... ¡ Joder, que país ! Mais je m'égare.
Eclipse sur la Route impériale des Cimes
Après avoir bouclé cette petite incursion en territoire basque par Sare, Cherchebruit, Ainhoa, Espelette (et ses délicieux piments doux qui sèchent sur les façades des maisons), St Pée sur Nivelle et Ascain (D406, D4, D20 et D918), nous fixons rendez-vous au soleil pour le lendemain, sur la Route impériale des Cimes (D22, jolie mais sans plus), en lui laissant le choix des armes. A l'heure dite, c'est donc chaussés de nos improbables lunettes "Terre et Mer, les éléments de la réussite" - censées vanter les mérites de la Charente maritime (!) - que nous assistons, vaguement déçus, à cet "événement" qui, bien qu'ayant sûrement fait couler 100 fois plus d'encre que les tortures de prisonniers sous Hassan II, ne fut pas vraiment à la hauteur de nos naïves espérances (faut dire qu'à 80%, il fait grand jour !). Heureusement qu'une bonne portion viroleuse - et en bon état ! - nous attend entre Cambo les Bains et St Jean Pied de Port, sur la D918. Les motards du coin semblent d'ailleurs bien connaître le filon ! Un petit crochet par St Etienne de Baïgorry (D948 et D15) est envisageable, mais pas transcendant. Vient ensuite le gentil petit Col d'Osquich (392 m, ça reste modeste !), toujours sur la D918 (qui perd largement en qualité de revêtement). Entre Mauléon-Licharre et Oloron Ste Marie, enfoncez-vous prudemment dans les forêts de la D24 via Barcus, complètement défoncée (nids de poule, rainurage, gravillons : la totale !) mais qui vaut le détour. Sinon restez sur la D918, sans surprise. Oloron Ste Marie, qui malgré son gros potentiel touristique encore inexploité (rivières superbes, vieux ponts de pierres et jolies baraques au bord de l'eau), offre le visage un peu sinistré d'une ancienne ville ouvrière, pourra servir de ville étape.
Somport, Pourtalet, Aubisque, Soulor
Très belle route que cette N134 qui suit le cours du Gave d'Aspe jusqu'au superbe Col du Somport (1632 m). A propos, il semble que le combat d'Eric Petetin contre le tunnel masqué se soit avantageusement soldé par la victoire du premier ! Après un arrêt déprime dans le seul troquet d'Asasp (un café au goût de chicorée, avec pour seule compagnie les mouches patinant sur la toile cirée terne, les bestioles empaillées au mur et le tic tac de l'horloge dans un coin - Emmanuelle en frissonne encore), le Somport présage déjà très bien l'ensemble des cols passés cet été : revêtement passable (sauf exception), abondante flore sauvage et paysages au top. Ceux qui souhaitent approfondir l'étude - passionnante - du comportement des automobilistes partant, avec femme et enfants, à l'assaut des Ventas (voir plus haut), sauront mettre à profit une incursion en Espagne par la N330. Ils auront en effet tout le loisir d'observer les moindres faits et gestes de cette incroyable tribu aux moeurs étranges, à leur retour, par le Col du Pourtalet (1794 m), entre l'A136 (côté espagnol) et la D934 (côté français). Hallucinant ! On peut ensuite revenir à la civilisation par Eaux Chaudes et Eaux Bonnes, deux stations de cures thermales qui sauront vous accueillir élégamment, dès l'entrée de la ville, par une bonne dizaine de panneaux de signalisation énonçant fièrement les spécialités locales : "Rhumatismes", "Arthrite", "Bronchite", "Asthme" et j'en passe. Malgré la qualité de cet accueil, on peut néanmoins préférer poursuivre jusqu'à Argelès-Gazost par la D918 pour passer la nuit ! Il suffit de passer le Col d'Aubisque (1709 m), après avoir admiré ce joyau de l'architecture humaniste que représente la station de ski de Gourette - les architectes seront-ils tous tondus à la Libération ? -, puis le Col du Soulor (1474 m).
Tourmalet, Aspin, Peyresourde, Portillon, Portet d'Aspet
Argelès-Gazost sera le point de départ idéal pour partir vers le mythique Col du Tourmalet (2115 m), en empruntant la très jolie D921 jusqu'à Luz St Sauveur (au pied du splendide Massif de Néouvielle). Là encore, pas de quartier pour ceux qui ont osé sortir de leur cervelle ramollie les plans d'urbanisation de Barèges et de La Mongie. Le Col du Tourmalet reste néanmoins incontournable, majestueux, énorme. Trois aigles nous accompagneront dans la montée en tournoyant au dessus de nos casques, puis c'est une chèvre qui fera mine de se suicider en se jetant sous les roues de la Trophy lors de la descente. Bien sûr, d'innombrables cyclistes jouent à "plus chargé que moi tu meurs, surtout avec mon maillot Bricorama rose fluo et mon caleçon moule burnes", mais pas de quoi fouetter un Virenque à l'insu de son plein gré. Le Col d'Aspin (1304 m), plus modeste, vaut le détour. Moins haut que le Tourmalet, il garde le même aspect majestueux, et permet de faire ses adieux à notre fidèle D918, en très grande forme jusqu'à Arreau. En passant le Col de Peyresourde (1569 m) par la D618, vous ferez une brève incursion en Haute Garonne, puis en Catalogne par le Col du Portillon (1293 m) et ses portions nickel, dignes des meilleurs circuits. Après avoir emprunté la rapide N230 espagnole (pardon, catalane), poursuivez dans le même esprit avec la N125 via Fos et St Béat. On retombe ensuite sur la D618, dont les nombreux petits cols vous ouvrent tranquillement les portes de l'Ariège : Col des Arès (797 m), Col de Buret (599 m) et Col de Portet d'Aspet (1069 m).
Eric MICHEL
© Moto-Net n°6 - Septembre 1999
EPISODE PRECEDENT :
1. Haut-Doubs et Parc du Haut-Jura (solo)
EPISODES SUIVANTS :
3. Ariège, Terre courage !(duo)
4. Les Monts du Cantal(duo)
5. Les volcans d'Auvergne(duo)
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